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Seulement vêtue d’un masque noir couvrant sa bouche et son nez, et d’un bonnet de laine noir, la femme anonyme a entrepris de faire des poses de yoga et de danse classique à un carrefour, devant une ligne de policier·ère·s armé·e·s. Elle est ainsi devenue un des symboles de la lutte pacifique contre le racisme et les violences policières.
Une manifestante nue face aux forces de l’ordre fédérales (déployées dans le cadre du nouveau projet exécutif de l’administration Trump visant à protéger les monuments et bâtiments fédéraux) lors d’une manifestation contre les inégalités raciales à Portland, dans l’Oregon, le 18 juillet 2020. (© Nathan Howard/Reuters)
Une mystérieuse “Athéna nue”
Les images de la manifestante ont fait le tour des réseaux sociaux et, faute de connaître son nom, elle a été surnommée “l’Athéna nue” (“The Naked Athena”) par un des journalistes présents, Donovan Farley, puis par les internautes et les médias. “J’ai choisi ce nom simplement parce qu’il m’est venu en tête sur le moment – sachant qu’elle est la déesse des actions héroïques, vu les circonstances, j’ai trouvé que ce surnom était approprié”, a expliqué le journaliste.
Les forces de l’ordre, qualifiées de “stormstroopers” à cause de leur lourd équipement de protection par Donovan Farley, ont entrepris de lancer des gaz lacrymogènes aux pieds de la jeune femme. Deux manifestants auraient tenté de la protéger avec des boucliers de fortune en carton mais “elle les a esquivés” et a continué de patiemment pointer du doigt les officiers.
“Elle était incroyablement vulnérable. Ç’aurait été incroyablement douloureux pour elle de se faire tirer dessus avec n’importe laquelle de leurs munitions, sans vêtements”, a déclaré Dave Killen, un des photographes présents cette nuit-là.
Une manifestante nue face aux forces de l’ordre fédérales (déployées dans le cadre du nouveau projet exécutif de l’administration Trump visant à protéger les monuments et bâtiments fédéraux) lors d’une manifestation contre les inégalités raciales à Portland, dans l’Oregon, le 18 juillet 2020. (© Nathan Howard/Reuters)
Une dizaine de minutes après son arrivée, les officier·ère·s ont quitté les lieux – dix minutes durant lesquelles l’Athéna en question n’aurait pas prononcé un mot. “Peu après, la femme est également partie, sans fanfare supplémentaire”, rapporte l’Oregon Live. “Tout le monde était surpris et assez abasourdi” a ajouté le photographe Dave Killen.
La manifestante ne devrait pas encourir de peines sachant qu’à Portland, la nudité en public est illégale seulement si elle a pour but “d’exciter”. De plus, le tribunal aurait considéré son action comme “une forme de protestation politique outrepassant les lois relatives aux bonnes mœurs”.
Une manifestante nue face aux forces de l’ordre fédérales (déployées dans le cadre du nouveau projet exécutif de l’administration Trump visant à protéger les monuments et bâtiments fédéraux) lors d’une manifestation contre les inégalités raciales à Portland, dans l’Oregon, le 18 juillet 2020. (© Nathan Howard/Reuters)
Une action révélatrice de lourdes tensions
Cette action met en relief les tensions que connaît la ville de Portland. Le Huffington Post rapporte que “le maire de la ville, Ted Wheeler, a demandé le retrait rapide des forces fédérales les accusant d’exacerber les violences et les tensions. Des propos qui font écho à ceux de la gouverneur de l’Oregon, qui a tancé un ‘véritable petit théâtre politique’, accusant Donald Trump d’opération de communication”.
La procureur de l’Oregon, Ellen Rosenblum, a quant à elle entamé des poursuites à l’encontre du gouvernement fédéral “face à des agissements illégaux de ses agents” : “Elle les accuse notamment d’avoir violé le droit constitutionnel de réunion, mais aussi d’avoir saisi et détenu illégalement des personnes sans mandat ni justification.”
Dans une lettre adressée au Bureau de l’inspection générale, des démocrates de la Chambre des représentants ont demandé une enquête interne au sein des départements de la Justice et de la Sécurité intérieure :
“Les citoyens s’inquiètent que l’administration ait déployé une force de police secrète, non pas pour enquêter sur des crimes, mais pour intimider des individus qu’elle considère comme des adversaires politiques, et que l’utilisation de ces tactiques prolifère dans tout le pays”, écrivent-ils.
Une manifestante nue face aux forces de l’ordre fédérales (déployées dans le cadre du nouveau projet exécutif de l’administration Trump visant à protéger les monuments et bâtiments fédéraux) lors d’une manifestation contre les inégalités raciales à Portland, dans l’Oregon, le 18 juillet 2020. (© Nathan Howard/Reuters)
Le Huffington Post ajoute que, pendant la troisième semaine de juillet, “des agents fédéraux [en treillis mais qui ne pouvaient être identifiés] ont été filmés en train de circuler dans des vans sans immatriculation dans la ville de Portland”.
En même temps que la résurgence du mouvement Black Lives Matter et les nombreuses manifestations antiracistes à travers le pays, les États-Unis font davantage éclater les divisions et la méfiance qui anime ses citoyen·ne·s, notamment vis-à-vis du président Donald Trump. Dimanche 19 juillet, ce dernier a assuré dans un tweet “essayer de défendre la ville de Portland, pas la blesser”, traitant les manifestant·e·s d’“anarchistes” et d’“agitateurs”.
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“Nous essayons de protéger la ville de Portland, pas de la blesser. Les gens qui les dirigent ont, depuis des mois, perdu le contrôle face à des anarchistes et des agitateurs. Ils sont absents du combat. Nous devons protéger la propriété fédérale ET NOTRE PEUPLE. Ce ne sont pas de simples manifestants, c’est du sérieux !”