Le français : on le parle tous les jours, pour se faire rire, pour se faire du mal, pour se réconforter, pour parler de l’autre soir quand Sandrine a pécho Timothée, pour s’avouer qu’on s’aime, ou bien qu’on ne s’aime plus. Tous les jours, toutes les nuits, on prononce des sons, on dit des mots, on utilise des expressions sans y penser ; mais, en fin de compte, sait-on vraiment ce qu’on dit ? Pas toujours : la preuve.
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Pourquoi dit-on “ça va ?”
Si vous êtes névrosé·e comme moi, répondre à un “ça va ?” peut s’avérer être une épreuve tout à fait angoissante. C’est la question à la fois la plus banale et la plus complexe qui soit, parce que répondre “oui” puis passer son chemin, c’est hautement suspect, et répondre “non, j’ai mal au ventre et je suis en dépression depuis quatre ans”, c’est un peu malvenu. Quant à rétorquer “oui et toi ?”, n’y pensons pas, c’est à double tranchant : soit vous vous engouffrez dans d’interminables salamalecs alors que vous avez un dossier à boucler pour 18 heures, soit votre interlocuteur·rice ne répond rien et vous vous retrouvez seul·e, si seul·e, comme toujours dans cette chienne de vie.
Stop, le terrain est miné, mieux vaut faire demi-tour. Mais les origines de ce terrifiant “ça va ?” vous rassureront peut-être un peu. Fut un temps, quand nous n’avions encore ni stéthoscopes, ni tensiomètres, ni IRM pour calmer nos alarmes hypocondriaques, on faisait avec les moyens du bord pour savoir si quelqu’un se portait bien : c’est-à-dire qu’on regardait le caca des gens.
Si votre caca était beau, on partait du principe que “ça allait”, et s’il était moche, c’est que ça “n’allait pas”, et on préparait en douce une tombe à votre nom. Donc pour s’enquérir de la forme de la boulangère, on lui demandait “comment vas-tu ?”, sous-entendu : “Comment vas-tu à la selle ? Comment ça se passe aux toilettes ?”
Bref, ne passons pas par quatre chemins et justifions mon titre pute-à-clics : quand vous demandez à une personne comment elle va, ce que vous demandez vraiment, c’est : “Comment est ton caca ? T’apporte-t-il entière satisfaction ? De quelle couleur est-il ? De quelle forme ? Dis-moi tout sur ton caca.” Et, au fond, quelle plus belle façon de s’intéresser à son prochain ?