Le français : on le parle tous les jours, pour se faire rire, pour se faire du mal, pour se réconforter, pour s’échanger des cartes Pokémon, pour s’avouer qu’on s’aime, ou bien qu’on ne s’aime plus. Tous les jours, toutes les nuits, on prononce des sons, on dit des mots, on utilise des expressions sans y penser ; mais en fin de compte, sait-on vraiment ce qu’on dit ? Pas toujours : la preuve.
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Pourquoi dit-on “soixante-dix”, “quatre-vingts”, “quatre-vingt-dix” ?
Comment se fait-il que passé la soixantaine, nos nombres partent ainsi en sucette ? Nous aurions très bien pu décider de dire, comme nos voisins suisses ou belges, “septante”, “octante” ou “huitante”, et “nonante”, ou quelque chose d’à peu près logique, au lieu de nos étranges “soixante-dix”, “quatre-vingts” et “quatre-vingt-dix”. Mais il y a une raison, comme toujours (souvent) en français.
Au Moyen Âge, du temps des Celtes, on comptait par paquets de dix et de vingt : trois vingt, c’était 60, trois vingt dix, 70, quatre vingt, 80, et quatre vingt dix, 90. Et il semblerait que cette façon de compter ait perduré en Gaule pour des raisons pratiques de calcul mental, parce que ça nous permettait de compter sur nos doigts les litres de cervoise, le nombre de sangliers rôtis à la table et le temps que ça va vous prendre pour comprendre que mes connaissances sur l’histoire de France reposent essentiellement sur Astérix.
Pour une raison ou pour une autre, on n’a jamais voulu passer à autre chose. Même quand les Romains ont conquis la Gaule et ont voulu nous imposer leurs X, leurs V et leurs I, on a répondu tout·e·s fier·ère·s : “D’accord pour l’invasion totale, mais nous, on va continuer de compter sur nos doigts de mains et de pieds, et ça, vous ne pouvez rien y faire.” Face à l’envahisseur, la France toujours libre. Et c’est quand même beau de se dire qu’aujourd’hui, quand on dit “quatre-vingts”, on rend discrètement hommage à un·e Gaulois·e qui comptait sur ses mimines et ses petits petons.