Eh les Français ! Vous êtes casse-bonbons avec vos cagnottes !

Eh les Français ! Vous êtes casse-bonbons avec vos cagnottes !

Pot de départ, chômage, mariage, divorce : elles sont PARTOUT et je n’en peux plus.

Je suis Suisse-Brésilienne, je suis arrivée à Paris il y a exactement deux mois et en si peu de temps, j’ai découvert beaucoup de nouvelles choses. En plus d’avoir réalisé que porter une baguette sous le bras n’était pas un mythe et que les escargots à la persillade ce n’était pas si mauvais, j’ai découvert un nouveau phénomène : LES CAGNOTTES. Rien que le nom me donne des frissons.

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Tout a commencé il y a deux mois, quand j’ai créé mon compte pro sur Gmail, pour le travail. Là, je me vois submergée par une montagne de mails avec des titres comme : “Bye, Jean-Jacques”, “Tu vas nous manquer Janine”. Je me suis dit : “Ah, c’est chou c’est un mail d’au revoir où les personnes avouent leur amour pour leur collègue qui s’envole vers d’autres contrées”. Mais non ! Je vois des messages d’amour très courts avec en dessous une phrase : “Voici la cagnotte ci-dessous”, suivi d’un… lien… Lydia.

J’avoue que le concept-même de donner de l’argent à quelqu’un qui part de son travail me paraît très étrange. C’est un peu comme si on disait : “Tiens, un peu d’argent pour survivre au chômage !”. Alors, pour des occasions heureuses comme une naissance, un anniversaire, un mariage… là, ça a du sens ! C’est de l’argent qu’on investit pour qu’une personne puisse fêter une réussite ou réaliser un projet. Dans ma tête, en tout cas. Mais qui fête le fait d’être au chômage ? Et si on est licenciés, on fait quand même une cagnotte ?

Du coup, pour mieux comprendre ce phénomène et la relation qu’ont mes “collllllllègues” (comme disent les quadragénaires) avec ces fameuses cagnottes, j’en ai fait un questionnaire (ANONYME, je tiens à préciser).

Que pensent les gens des cagnottes ?

Dans le questionnaire, les gens ont participé, en moyenne, à 30 cagnottes dans leur vie. Certains ont même atteint les 300 ! Ça fait beaucoup de cagnottes, quand même.

Mais ce qui m’a interpellée c’est que quasiment la moitié des gens s’en foutent et un tiers disent que ça les angoisse :

Les témoignages confirment ces chiffres :

“Au travail, faire des cagnottes pour des départs c’est OK, mais en faire pour tout et n’importe quoi, ça va deux minutes : anniv, naissance, mariage : démerdez-vous.”

“Bah pourquoi pas pour un cadeau ou pour des assos, mais pas pour le chien rêvé de Magalie, 37 ans qui veut absolument un caniche. Donc que si c’est pratique ou nécessaire.”
“C’EST COOL, MAIS Y’EN A TROP, WESH !”
“Peut être aussi utile et bienveillant qu’inutile.”
“Une par semaine depuis cinq ans, je suis au bout.”
“Il y a souvent trop ou pas assez d’argent, l’argent est gaspillé et ne sert jamais à acheter ce pour quoi la cagnotte a été faite.”
“Obligation sociale de merde.”
“En fait, y’a pas à se faire KEN ses sous comme ça AUSSI SOUVENT.”
“Pour les anniversaires c’est très bien (le gros anniversaire 25, 20 ans, etc.) mais je trouve que ça perd de la magie. Les gens se cachent beaucoup derrière ce concept et donc n’offrent plus de cadeaux qui viennent du ‘cœur’. Je trouve ça tellement mignon et sympa d’offrir plein de petits cadeaux”.

J’ai découvert les trois éléments gênants des cagnottes : les relances, l’anonymat et le montant

I. Les relances : le message relou

“Hello !!! C’est l’heure de la relance – on la connaît, on ne l’adore pas spécialement, mais elle est importante.”
Si vous avez déjà participé à une cagnotte (ce qui est probablement le cas), vous avez sûrement déjà reçu un message du genre. Cette piqûre de rappel semi-sympa, semi-angoissante, qui te met sous les projecteurs alors que tu essayes de te cacher.
Dans le questionnaire, j’ai découvert qu’il y avait deux types de personnes lorsqu’on parle des relances : les rageurs et les fair-play. Les rageurs sont ceux qui en ont marre d’être mis dans dix boucles de mails de cagnottes par mois et qui ne supportent pas la pression. Les fair-play sont ceux qui le voient quasiment comme une alarme qui a bien fait de sonner sinon, ils l’auraient oublié. Voilà ce qu’ils disent :

Les rageurs

“C’EST HORRIBLE DE METTRE LA PRESSION AUX GENS POUR QU’ILS DONNENT DE L’ARGENT.” (C’est bien en majuscules, je précise.)
“L’ENFER SUR TERRE.” (Aussi en majuscules.)
“Je quitte la conversation.” (Vénère.)
“C’est LOURD.”

Les fair-play

“Ça ne me dérange pas du tout, au contraire, ça me permet de ne pas zapper.”
“Nécessaire !”
“RELOU, MAIS NÉCESSAIRE (je participe toujours last minute).”

II. L’anonymat

Voilà un autre moment gênant des cagnottes. À quel moment est-ce que vous dévoilez votre identité ? Est-ce que ça dépend de la relation que vous avec la personne ? Du montant ? Ou des deux ? Toujours lors de ma recherche intense, j’ai découvert qu’il y avait trois types de personnes : les réservés, les rationnels et les chercheurs d’attention.

Les réservés
Ce sont les personnes qui sont TOUJOURS anonymes. Peu importe le montant ou la relation qu’ils ont avec les autres, ils n’ont pas de besoin de reconnaissance. Avoir leur nom sur la carte de remerciement leur suffit laaaargement.

Les rationnels
Généralement, ce sont les personnes qui participent à toutes les cagnottes, mais qui réfléchissent bien au montant qu’ils vont mettre, en fonction de leur complicité avec la personne. Ils vont généralement dévoiler leur identité qu’à partir de dix euros, mais sinon, ils préfèrent rester dans l’anonymat total.

Les chercheurs d’attention
Ce sont ceux qui ne voient pas l’intérêt de participer si on n’a pas de reconnaissance. À quoi ça sert de participer à un cadeau si on ne peut même pas nous remercier ?

III. Le montant : le reflet de la complicité

On arrive à la fin. Voilà le dernier élément gênant des cagnottes, selon moi. Quels sont les critères pour choisir le montant que vous allez verser ? Est-ce que vous avez une fourchette de prix correspondant à chaque degré de complicité ? Est-ce que vous êtes capables de donner deux euros à quelqu’un et vingt euros à quelqu’un d’autre ? Voilà les trois personnalités que j’ai découvertes dans ce genre de situation.

L’économe radical
L’économe radical est une personne qui va faire un beau calcul des coûts et bénéfices avant de verser de l’argent dans la cagnotte. Il va prendre en compte le degré de complicité avec la personne, son budget mensuel et la réserve qu’il lui faut pour verser de l’argent à ses 250 cagnottes annuelles.

Le radin
Le radin est généralement quelqu’un qui n’aime pas trop les cagnottes, mais qui participe quand même. Il va verser le strict minimum et très souvent, il va rester anonyme (car le montant peut carrément atteindre les 1,25 euros).

Le (trop) généreux
Comme son nom l’indique, le généreux a le cœur sur la main. Même trop, jusqu’au point de ne plus avoir de l’argent à la fin du mois. C’est généralement une personne empathique, qui adore les cagnottes et qui aurait voulu qu’on lui verse autant d’argent. S’il ne verse pas environ 15 euros, il va être submergé par une culpabilité abominable.

Le mot de la fin

Bon, après avoir analysé tous les points de vue et profils différents, je comprends un peu mieux la popularité des cagnottes : c’est pratique et ça permet d’acheter un cadeau plus grand en rassemblant les forces. Par contre, je trouve que si on le fait tout le temps, à n’importe qui et pour n’importe quelle occasion, ça perd de son “charme”. J’avoue que je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est un peu cringe, quand même. Donc pour rester là-dessus, je vous laisse avec quelques anecdotes gênantes de mes collègues :

“Une fois, j’ai versé deux fois de l’argent sans m’en rendre compte du coup, bénef pour la personne mais pas pour moi :(”
“J’ai déjà fait genre d’avoir participé à une cagnotte sans que le principal intéressé ne s’en rende compte. Quand la personne m’a fait un câlin pour me remercier pour le cadeau, j’ai juste répondu ‘t’inquiète, c’est normal’.”
“Des connaissances m’ont déjà demandé de participer à une cagnotte pour une pote mais n’ont pas pensé à m’inviter à l’anniversaire ensuite…”

“Plein de fois je découvrais les cadeaux en même temps que le principal intéressé, même si j’avais participé à sa cagnotte…”