Tous les mois, sortent plusieurs dizaines de films. Entre les sorties en salle, les ressorties de vieux films, les plateformes et autres, difficile de suivre l’actualité. Chaque mois, on revient sur les films à ne surtout pas manquer. Ce mois-ci, du documentaire, du blockbuster bleu, de l’enquête et du film culte.
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Lost Highway, de David Lynch (Potemkine) – sortie le 7 décembre
Adultère, assassinat, schizophrénie : voici une impossible tentative de résumé de Lost Highway de David Lynch qui, en 1997, imposait définitivement sa patte de réalisateur bizarroïde en nous plongeant dans l’esprit d’un schizophrène. Un film tout aussi schizophrénique que son héros sombre qui explosait toute linéarité et torturait les méninges des spectateurs désemparés.
Cigarettes, Cadillac et cassettes VHS, Lost Highway, c’est aussi l’essence de l’esthétique 90’s. Ne cherchez donc pas à comprendre et laissez-vous simplement porter en allant donner — ou redonner — sa chance à cette ressortie sur grand écran.
Nos frangins, de Rachid Bouchareb (Le Pacte) – sortie le 7 décembre
Vous avez vu la série Disney+ Oussekine et pensez tout connaître de l’affaire ? Ce film vous prouvera le contraire. Concluant la trilogie sur une certaine histoire française de l’immigration maghrébine (après Indigènes et Hors-la-loi), Rachid Bouchareb prend le parti pris de ne raconter que les quelques heures suivant la nuit du 5 au 6 décembre 1986 et le décès de Malik Oussekine — mais aussi d’Abdel Benyahia, dont on parle beaucoup moins.
Le cinéaste se concentre sur la famille des victimes, essayant de comprendre et cherchant les corps. Pas d’ambition de reproduction politique ou autre, les archives racontent bien mieux tout ça. Un film important.
Les Pires, de Lise Akoka et Romane Guéret (Pyramide) – sortie le 7 décembre
Anciennes directrices de casting et coach enfants, les deux jeunes femmes sont passées de l’autre côté de la caméra pour réaliser leur premier long-métrage, récompensé par Un certain regard à Cannes. Avec beaucoup de justesse de d’humanité, elles interrogent la responsabilité d’une profession qui porte aux nues de jeunes talents jusque-là inconnus et leur fait vivre une expérience forte et intense, mais très souvent éphémère.
En immersion dans une cité de Boulogne-sur-Mer, les deux réalisatrices poursuivent, avec Les Pires, le travail qu’elles avaient amorcé avec leur court-métrage Chasse royale et ont complété leur casting avec de nouveaux jeunes non professionnels un peu cabossés, mais tellement puissants.
Falcon Lake, de Charlotte Le Bon (Tandem) – sortie le 7 décembre
Pour son premier long-métrage, la Québécoise a choisi d’adapter la bande dessinée subversive et sensuelle Une sœur, de Bastien Vivès. Elle raconte, en images, les vacances en famille d’Antoine, 13 ans, et de son éveil sexuel par Hélène, 16 ans, la fille du couple d’amis de ses parents. C’est au cœur de ces longues journées d’été loin des adultes, entre la moiteur de la chambre qu’il partage avec Chloé et les rives du lac Falcon, qu’Antoine va vivre des vacances uniques grâce à l’impétueuse adolescente.
Falcon Lake est un teen movie pudique à la lisière du fantastique qui convoque le meilleur des deux genres et traite de l’éveil sexuel adolescent avec beaucoup de pudeur et de délicatesse.
Mourir à Ibiza (Un film en trois étés), d’Anton Balekdjian, Mattéo Eustachon et Léo Couture (Shellac) – sortie le 7 décembre
Âgés d’une vingtaine d’années seulement, Anton Balekdjian, Mattéo Eustachon et Léo Couture réalisent un premier projet atypique qui suit l’histoire d’une amitié de vacances entre Léna, Marius, Ali et Maurice. À Arles, à Étretat puis à Ibiza, leur relation évoluera durant ces trois étés. C’est armé de leurs simples motivation, passion et envie que les trois jeunes réalisateurs se sont lancés dans ce projet à l’été 2019 et ont tourné le premier volet — très amateur — de leur triptyque ensoleillé.
Au fil des étés, les héros gagneront en maturité, les cinéastes en soutien financier et l’évolution à l’écran en devient donc doublement intéressante. Le résultat est un teen movie rohmérien touchant, très inspiré de l’œuvre du cinéaste dans le fond comme dans la forme.
Pinocchio, de Guillermo Del Toro (Netflix) – sortie le 9 décembre
Le monstre du septième art, Guillermo Del Toro, continue l’exploration de son amour pour les créatures avec un film en stop-motion pour Netflix. Une réécriture de Pinocchio, plus sombre et plus politique que les dernières versions que l’on a pu avoir, et qui sent le chef-d’œuvre à des kilomètres à la ronde.
Avatar : la voie de l’eau, de James Cameron (Disney) – sortie le 14 décembre
Le premier a, contrairement à ce que peuvent penser certains rageux un peu bas de plafond, changé la face de l’histoire du cinéma. En travaillant la 3D comme personne ne l’avait fait jusque-là (et personne ne l’a refait depuis), Avatar a été un bouleversement notable, devenant au passage l’un des plus grands succès de l’Histoire. On ne sait pas si la suite aura le même destin, c’est tout ce qu’on lui souhaite. Mais ce qui est sûr, c’est qu’il s’agit bien là de l’événement le plus important de décembre côté septième art.
Corsage, de Marie Kreutzer (Ad Vitam) – sortie le 14 décembre
Plus qu’un simple film d’époque en costume, cette réécriture de Sissi l’Impératrice ressemble davantage, de prime abord en tout cas, à la Marie-Antoinette de Sofia Coppola qu’à la trilogie portée par Romy Schneider sur ladite princesse (il y a 75 ans déjà). La réalisatrice autrichienne Marie Kreutzer raconte un sombre envers du décor, à savoir le pouvoir du patriarcat sur le corps des femmes et le culte de la minceur. Le tout dans un film assez sublime visuellement.
Les Années Super 8, d’Annie Ernaux et David Ernaux-Briot (New Story) – sortie le 14 décembre
Le 6 octobre dernier, Annie Ernaux recevait le prix Nobel de Littérature. 48 ans après sa première publication et aujourd’hui âgée de 82 ans, l’autrice est plus que jamais au centre des débats féministes et s’est même récemment imposée comme un modèle pour une nouvelle génération de militantes.
Après son passage sur Arte, le documentaire Les Années Super 8, réalisé par Annie Ernaux et son fils, sort en salle. En filigrane de ces images grainées et vintages, c’est la trace intime des années d’insouciance et le témoignage universel d’une époque, mais surtout les années déterminantes de la vie d’Ernaux, celles de son premier manuscrit accepté par les éditions Gallimard.
Bardo, fausse chronique de quelques vérités, d’Alejandro Gonzalez Inarritu (Netflix) – sortie le 16 décembre
Nouveau film d’Inarritu, sacré deux fois meilleur réalisateur aux Oscars pour Birdman et The Revenant, Bardo est son œuvre la plus personnelle, mais aussi peut-être la plus inaccessible. Pour la première fois depuis Amores Perros, son premier film réalisé en 2000, il a tourné Bardo entièrement au Mexique et fait de son pays d’origine la matière première de son film.
Il filme le voyage intérieur de Silverio, journaliste mexicain et alter ego du cinéaste, qui rentre dans son pays natal pour recevoir un prix prestigieux, sans savoir que ce retour va le confronter à une terrible crise existentielle. Mais Bardo vaut surtout pour son patchwork d’images et de séquences surréalistes, visuellement et techniquement magnifiques, que l’on doit à son très célèbre directeur de la photographie Darius Khondji.
Le Parfum Vert, de Nicolas Parisier (Diaphana) – sortie le 21 décembre
Un comédien de la Comédie-Française est tué sur scène. On soupçonne assez rapidement Martin, un de ses collègues. Ce dernier, à la poursuite de la vérité, va se faire aider par Calire, une dessinatrice de BD. De par le travail de cette dernière, Parisier s’amuse à puiser dans le neuvième art, de Tintin à Corto Maltese, même si la référence évidente ici est Hitchcock. Que vous soyez amateurs de BD franco-belges ou de thrillers, le film est fait pour vous.
Les Huit Montagnes, de Charlotte Vandermeersch et Felix Van Groeningen (Pyramide) – sortie le 21 décembre
Retraçant sur des décennies l’amitié complexe entre deux garçons, l’un venant de Turin et l’autre de la campagne, Les Huit Montagnes est une revisite de Brokeback Mountain explorant plutôt la question de l’amitié et des différences sociales que de celle de l’amour charnel. Une chronique de vie, dans des décors splendides des montagnes italiennes, qui a marqué la compétition cannoise et va sans doute marquer votre année cinéphilique.
Glass Onion : une histoire à couteaux tirés, de Rian Johnson (Netflix) – sortie le 23 décembre
Le détective Benoît Blanc (Daniel Craig) se fait inviter sur l’île d’un milliardaire, au milieu d’une troupe de copains de ce dernier. Débarquent une enquête, une intrigue, et démarre le whodunnit totalement revisité. Suite du premier À couteaux tirés, toujours réalisé par Rian Johnson et avec un casting de rêve, ce Glass Onion d’une intelligence rare et superbement mis en scène sera votre nouveau film de Noël préféré.
Les Banshees d’Inisherin, de Martin McDonagh (Disney) – sortie le 28 décembre
Ici, nous ne connaissons Martin McDonagh que pour ses films Bons baisers de Bruges et Three Billboards : Les Panneaux de la vengeance. Ce serait oublier la carrière de dramaturge de l’Irlandais qui, pendant des années, a raconté sur les planches l’histoire de l’île britannique, notamment avec sa trilogie des îles d’Aran. Ce film pourrait être la conclusion que cette trilogie n’a finalement jamais eue. Car en racontant l’impact de la fin de cette longue amitié entre deux natifs de la côte Ouest de l’Irlande, McDonagh conte une part de l’histoire de sa terre natale.
White Noise, de Noah Baumbach (Netflix) – sortie le 30 décembre
Après The Meyerowitz Stories en 2017 et le très beau Marriage Story en 2019, le réalisateur new-yorkais persiste et signe pour la troisième fois avec la plateforme, en réalisant White Noise, adapté du roman Bruit de fond de Don DeLillo et présenté en ouverture de la Mostra de Venise, où il était en compétition officielle.
Dix ans après Frances Ha, il réunit Adam Driver et Greta Gerwig en parents d’une famille américaine moyenne des années 1980, forcée de fuir son domicile alors que survient un inquiétant nuage dû à un “événement toxique aérien”. Le résultat : une sorte de satire apocalyptique à la Don’t Look Up, en mode “accidentally Wes Anderson”.
Article coécrit par Arthur Cios et Manon Marcillat.