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NextGen, c’est le nouveau format audio 100 % rap FR et découverte de Konbini. Deux fois par mois, on invite un DJ, producteur ou beatmaker pour qu’il nous présente sa vision de la nouvelle génération du rap francophone à travers un mix d’une heure.
Dans ce quatrième épisode en collab avec le collectif 69 Degrés, c’est Kayla qui nous partage sa vision du game. L’artiste de 23 ans est à l’initiative des soirées Candy South à Marseille dont le concept est de rassembler sur un même plateau des artistes exclusivement féminines. Elle nous raconte.
Konbini⎮C’est quoi pour toi la définition de la nouvelle génération rap FR ?
Kayla⎮Je vois la nouvelle génération qui arrive comme celle qui a le moins de limites sur le plan créatif. J’ai l’impression que chaque artiste ose explorer de nouveaux territoires tout en restant fidèle à son ADN. Par exemple, la première fois que j’ai écouté “Reflet” de Misa, je ne m’attendais absolument pas à ce que le morceau se finisse avec des drums aussi dansants alors que le couplet qui précède est armé d’un texte puissant et sérieux sans percussion.
De plus en plus, je trouve que les rappeurs, tout autant que les producteurs, s’autorisent plus de choses. Ils ont peut-être moins peur d’être jugés quant aux codes qui régissaient le rap jadis. Je pense par exemple aux basses 808 très grasses de certaines productions. Parfois, elles sont même trop “grasses”, et on se rend finalement compte que c’est ce qui fait la particularité et la force du morceau. On retrouve ça sur “Freeze Raël” produit par Flem par exemple.
Aussi, je crois que quelque chose s’est véritablement décomplexé au niveau du chant. Beaucoup de rappeurs qui ne chantaient pas avant s’y sont mis. Beaucoup d’artistes ne sont plus “catégorisables” car leur style mélange des textes rappés, chantés et des toplines relativement douces. Je pense notamment à mon gars Cookie BBT ou à des artistes comme Made in Paris, Rad Cartier, ou Lala &ce.
Il y a moins de limites aussi aux collaborations qu’il peut y avoir entre les artistes, et je trouve ça incroyable. On mélange autant les styles que les générations ou les villes. Je pense par exemple au feat entre Rohff et Tayc : qui peut se vanter d’avoir vu ce feat arriver ? Même chose pour un Niro feat. Le Rat Luciano sur une drill, ou encore un Hamza feat. Christine and the Queens sur “Minuit 13”.
Il y a de plus en plus de mixtapes qui voient le jour, comme récemment la tape Saboteur sur laquelle on retrouve sur un même morceau un Deen Burbigo que j’écoute depuis le collège, un Lasco que j’ai découvert il y a presque dix ans avec LTF, et un Ratu$ que j’ai connu sur le dernier projet de Gros Mo.
Les projets de beatmakers sont eux aussi particulièrement intéressants. Je pense à celui de Binks Beatz, celui de Meel B ou celui de Twinsmatic qui était sorti pendant le confinement. C’est une manière de découvrir plus largement leur univers propre, leur direction artistique, et je pense que pour eux, c’est une manière de s’exprimer librement, en invitant à leur tour des artistes qui les inspirent.
Pour résumer, je dirais vraiment que cette nouvelle génération sera celle qui n’a pas peur d’exercer son art sans limite ni frontière, en restant fidèle à ce qu’elle est et à ce qu’elle aime.
Quels sont pour toi les trois rappeurs ambassadeurs de la nouvelle génération que tu as mis dans ton mix et pourquoi ?
Ben.C, parce que je n’ai jamais vu aussi ambitieux, déterminé et sérieux à son âge. Je le trouve trop chaud. Musicalement, il apporte un vrai truc, autant au niveau de ses flows et de ses placements de voix qu’au niveau de ses toplines. On s’est rencontrés par hasard à Marseille il y a un an et demi, je lui ai mis une instru, il l’a pliée et j’étais choquée. Il représente Marseille fort et va faire partie de ceux qui vont faire briller la ville.
La Fève, parce qu’il s’est créé un véritable univers qui lui est propre. Il va chercher des flows différents et des références différentes. Sa voix est reconnaissable, ses prods le sont aussi. Techniquement, je le trouve au-dessus de beaucoup, et le pire, c’est qu’on dirait qu’il le fait sans forcer. Je crois que j’apprécie de plus en plus les artistes comme lui ou comme NeS, qui ne s’inventent pas une vie pour rentrer dans les codes du rap mais qui restent fidèles à qui ils sont.
Joy C, parce que je trouve qu’elle a un potentiel incroyable et une marge de progression infinie. Elle m’a impressionnée quand on s’est rencontrées la première fois : ça fait très peu de temps qu’elle fait du son et pourtant elle sait rapper, chanter, et très vite trouver de méchantes toplines. Le tout autant sur de grosses prods trap que sur de l’afro ou du R’n’B. Je lui dis souvent : je crois beaucoup en elle. Pour moi, Joy C, c’est une superstar en devenir, et au-delà de ça, une artiste et une personne avec qui j’aime beaucoup travailler.
Quels sont pour toi les trois producteurs ambassadeurs de la nouvelle génération que tu as mis dans ton mix et pourquoi ?
Kosei, il est carrément incontournable aujourd’hui. Il arrive avec la vague dans laquelle on trouve La Fève, Khali ou encore S.téban. On ressent vraiment l’osmose entre ses prods et la vibe de ces artistes. Je ne saurais pas comment l’expliquer : on dirait un vrai mariage d’amour, ça matche trop bien. Les mélos légères et aériennes associées aux grosses basses 808, je crois que c’est son cocktail le plus efficace.
Mehsah, parce que je suis une matrixée du boom-bap. J’en ai énormément écouté avec la génération d’avant (la FF, Oxmo Puccino, Fugees ou encore Mobb Deep…) et je trouve que Mehsah parvient parfaitement à garder l’authenticité de ces sonorités tout en arrivant à les placer au goût du jour, notamment avec des artistes pertinents comme Lesram, PLK ou Zikxo.
Et pour finir, Drastiques Mesures, parce que c’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup et un artiste que j’admire énormément. C’est un ingénieur son, beatmaker et musicien qui a tellement d’influences musicales différentes qu’il peut glisser sur n’importe quel terrain à tout moment… mais toujours à sa sauce. Il a bossé avec tout Marseille. Beaucoup d’artistes que j’ai mis dans le mix sont déjà passés dans son studio, comme STLR et Cookie avec qui il collabore beaucoup depuis des années, ou Creamy G et Joy C. C’est un vrai passionné de musique et il a vraiment sa pâte, tu reconnais directement une prod faite par Drastiques.
Le mix NextGen de Kayla s’écoute juste ci-dessous, mais également sur Apple Podcasts ou Deezer. Abonnez-vous pour ne rater aucun épisode !