Vous avez peut-être déjà vu ce cliché sans vous en rendre compte : un peu comme la juge noire dans les séries qui se déroulent au tribunal ou la meilleure amie noire dans les comédies romantiques, la psy noire est censée offrir une sorte de “double représentation” facile et opportuniste pour les créateurs. Qu’il soit plein de sagesse ou de repartie, son personnage n’a généralement que quelques répliques et la série, qui bénéficie de ses lumières, n’est jamais centrée sur lui. La nouvelle saison de In Treatment, disponible sur OCS depuis le 24 mai, va au-delà de cette représentation stéréotypée.
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Dans les trois premiers volets diffusés entre 2008 et 2010, le psy était incarné par Gabriel Byrne (un rôle récemment repris par l’excellent Frédéric Pierrot pour la version française). Dans cette saison 4, Paul Weston a disparu (on apprend brièvement qu’il est devenu expert sur les plateaux de télévision pendant la pandémie) et la psy s’appelle désormais Brooke Taylor. Thérapeute bourgeoise installée dans les hauteurs de Los Angeles, elle est finement jouée par Uzo Aduba (qu’on connaissait déjà en tant que Suzanne “Crazy Eyes” dans Orange Is the New Black).
Une psy plus complice avec ses patients
© HBO
L’arrivée de Brooke dans la série est tout sauf symbolique. Certes, la dynamique est différente quand la psy n’est plus un homme blanc : certains patients la draguent pour la déstabiliser, d’autres la prennent pour leur mère, d’autres encore font des remarques insensibles sur le racisme ambiant. Sa connaissance personnelle des dynamiques de genre et de racialisation ainsi que son approche complice avec sa patientèle font sa force – lorsqu’elle doit traiter des patient·e·s racisé·e·s, comme Eladio ou Laila, une connivence s’établit directement, un raccourci naît dans la conversation et permet d’aller plus vite au cœur du problème.
Réalisée pendant la pandémie, la saison n’échappe pas au bingo des œuvres conçues sous cette ère : les rendez-vous sur Zoom et références au mouvement Black Lives Matter sont forcément de la partie. La série frappe surtout par sa volonté d’aller au-delà des représentations simplistes et des clichés sur la thérapie (s’il y a une tendance particulièrement regrettable dans toute la lignée des séries adaptées de BeTipul, c’est que les patients sont souvent hostiles à la guérison et que la raison de leur venue n’a souvent qu’une seule cause).
Une saison pleine de questionnements
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Les trois nouveaux patients sont Eladio, Colin et Laila. Parmi eux, deux sont racisés et queers, mais cette identité n’est pas le point central de leurs séances, seulement une facette parmi d’autres dans leur quête d’introspection. Sans généralité ni twist sensationnaliste sur leur mal-être, la série creuse le rapport entre ces patient·e·s et le monde qui les entoure, mais aussi leur rapport à l’argent, à l’amour ou à leur propre corps.
Les meilleurs épisodes sont sans doute ceux consacrés à Brooke, qui lutte elle-même avec sa sobriété, le deuil de son père et ses interrogations de plus en plus pressantes sur les sacrifices qui lui ont permis d’avoir une carrière épanouie. Une nouvelle saison toute en nuances et en interrogations, qui apporte un regard frais à un concept sériel pourtant mille fois décliné.