The Haunting of Hill House : une histoire de fantômes aussi terrifiante qu’émouvante

The Haunting of Hill House : une histoire de fantômes aussi terrifiante qu’émouvante

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© Netflix

Netflix frappe fort avec sa nouvelle série horrifique, entre poésie macabre et histoire d’épouvante insoutenable.

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Après la série American Nightmare d’USA Network et l’anthologie Into the Dark d’Hulu, c’est au tour de Netflix d’entrer dans la danse des séries horrifiques de cette rentrée 2018-2019. The Haunting of Hill House est une adaptation du roman culte de Shirley Jackson, publié en 1959 et déjà adapté deux fois au cinéma en 1963 et 1999. Une histoire de fantômes qui nous plonge dans un manoir gothique grâce à la plume et la mise en scène de Mike Flanagan, expert en la matière (The Mirror, Jessie, Pas un bruit).

The Haunting of Hill House est une série chorale qui suit la vie difficile de la famille Crain. Les parents et les 5 enfants de cette fratrie ont vécu une expérience traumatisante au sein d’une maison hantée, qui a fini par pousser la matriarche du foyer au suicide. Cette époque a eu des conséquences différentes mais considérables sur chacun d’entre eux : Steven a fait de cette histoire un roman à succès, Theodora a suivi une formation en pédopsychiatrie, Luke a sombré dans la drogue…

Des années plus tard, alors qu’ils pensaient avoir laissé les morts derrière la porte de Hill House, Nell, la benjamine de la famille, se suicide à son tour. Désemparés et bouleversés par ce nouveau deuil, les quatre frères et sœurs et leur père vont devoir surmonter leurs peurs des spectres afin de comprendre le geste désespéré de Nell et tourner définitivement la page.

Un fantôme peut en cacher un autre

Rares sont les séries d’horreur aussi foncièrement effrayantes que The Haunting of Hill House ces dernières années. Dans sa première promesse, celle de nous rendre parano la nuit dans le noir avant de se coucher, le show de Netflix est implacable. Parfaite antithèse d’American Horror Story, la série fait reposer ses éléments d’épouvante sur une ambiance gothique et insoutenable, quelque part entre Guillermo del Toro (dont cette scène de danse hypnotique dans le pilote) et Stephen King. Et contrairement à l’œuvre de Ryan Murphy, Mike Flanagan emploie très peu le gore et le spectaculaire chers au showrunner.

Ainsi, la mise en scène du réalisateur est bien plus subtile et poétique mais tout aussi intense. Tout au long des dix épisodes de la saison 1, il s’amuse par exemple à cacher des fantômes dans les arrière-plans des scènes dans le manoir. Mike Flanagan a travaillé l’atmosphère angoissante de son bébé jusqu’aux moindres détails fugaces qui, s’ils ne vous échappent pas, vous traumatiseront un bon moment (big up au visage cadavérique planqué dans les escaliers sous la trappe, dans l’épisode 3). Une idée intéressante et terrifiante empruntée au réalisateur William Castle, qui a mis en scène… House on Haunted Hill, en 1959 ! Un tel clin d’œil, ça ne s’invente pas.

De ces hommages et ces références au genre, Mike Flanagan tire le meilleur. D’une certaine manière, The Haunting of Hill House est une brillante adaptation officieuse de Stephen King. Elle met largement KO la décevante Castle Rock, notamment à travers le personnage de Theodora, plus “kingesque” que la Molly Strand de l’anthologie horrifique incarnée par Melanie Lynskey. Ces deux protagonistes, qui partagent un don de clairvoyance, sont traités différemment : Theo en profite pour faire le bien et empêcher des agressions sexuelles sur ses enfants patients, tandis que Molly l’emploie pour… rien, en fait.

Chaque personnage de la série, écrit de manière convaincante et très réaliste (on sent que des éléments autobiographiques ont influencé l’écriture), est hanté par son propre fantôme qui prend une apparence différente. Nell est terrorisée par la Dame au cou tordu, tandis que Luke est poursuivi par un immense bonhomme au chapeau melon, (nouveau) clin d’œil évident au Slender Man de la génération Internet. Ces spectres sont une métaphore évidente de leurs propres démons intérieurs (l’addiction pour Luke, la peur de la mort pour Shirley reconvertie en thanatopracteur, la forme de phobie sociale manifestée chez Theo…), convoqués par les peurs de l’enfance mais aussi, et surtout, une incapacité à faire le deuil de leur mère.

The grief of Hill House

Même si The Haunting of Hill House est bel et bien flippante, sa plus grande force réside dans son écriture et son traitement du deuil où elle se révèle comme un émouvant drame psychologique. À cela, il faut ajouter les très jeunes acteurs de la série, tous bluffants et plus craquants les uns que les autres. Tout au long de la saison, il y a un jeu de questions/réponses, de miroir inversé entre les deux versions des personnages. Le récit ainsi construit, complexe mais très facilement compréhensible, d’où la nuance, est tout bonnement addictif.

En effet, à la manière de Dark, Mike Flanagan nous raconte ces traumatismes sous la forme d’un trip labyrinthique avec des timelines entremêlées. Si le récit peut parfois se répéter (des scènes similaires qui reviennent pendant plusieurs épisodes), ces digressions s’harmonisent de façon fluide et surtout révélatrice, comme une parfaite utilisation de la boîte à outils du scénariste de série. Et malgré l’effroi qui nous traverse lorsque les personnages (sur)vivent dans la Hill House, on devient fascinés par cette histoire métaphysique sur la mort, où les apparences sont souvent trompeuses et les points de vue alternent, dans l’esprit du Elephant Man de David Lynch.

Petit à petit, une forme de mélancolie s’empare de ces personnages traumatisés. Chacun réagit à sa façon face au deuil : Steven le rationalise en chassant de faux fantômes pour alimenter ses romans, Shirley s’attaque à la mort de la façon la plus froide et scientifique possible, Theo tente de soigner son trauma à travers les enfants qu’elle aide… La série parvient même à nous bouleverser quand on en vient à se demander si les esprits de Hill House sont réels, ou s’ils ne seraient pas une simple manifestation psychique de la douleur des enfants devenus adultes. Et si leur mère était “juste” tombée dans la démence et non possédée par un esprit maléfique avant de mourir ? La recherche de vérité des personnages est finalement l’aspect le plus glaçant de la série.

Derrière ses abominations et ses apparitions spectrales, The Haunting of Hill House est un récit très juste et passionnant sur le deuil, ses conséquences et ses remèdes. Avec une galerie de personnages captivants, ses plans magistraux, sa mise en scène intense et rafraîchissante et son développement lent et envoûtant, la série horrifique de Mike Flanagan est un pur moment de frissons dans tous les sens du terme. Devant des épisodes comme “The Twin Thing” ou “Silence Lay Steadily”, on en vient même à se demander si on pleure de terreur ou simplement d’émotions, tant la poésie macabre qui se manifeste devant nous est sublime.

La première saison de The Haunting of Hill House est disponible en intégralité sur Netflix.