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À l’heure où les justiciers nés de la collaboration entre Marvel et Netflix sont mal en point – et encore, c’est un euphémisme –, leurs équivalents côté DC, eux, sont sur la pente ascendante. Rappelez-vous, à l’automne 2018, la plateforme de streaming DC Universe était inaugurée, promettant l’arrivée progressive de plusieurs productions originales dans les mois, voire années, à venir. Après une première salve plutôt réussie pour Titans ainsi que la diffusion en loucedé du revival de la série animée Young Justice, l’heure est venue d’accueillir Doom Patrol et ses héro·ïne·s brillamment chelou·e·s.
Déjà présentés lors d’un épisode de Titans (peut-être le meilleur de sa première saison, mais ça reste à débattre), les protagonistes de Doom Patrol se démarquent assez radicalement de Robin, Starfire et tous les autres de la série mère. Dans ce spin-off, on suit donc le quotidien mouvementé d’êtres hors du commun, possédant chacun des capacités les rendant inaptes à vivre en société.
Dans le pilote de la série, on en découvre tout pile quatre. Il y a Robotman, un ancien pilote de course dont le cerveau a été transplanté dans une carcasse métallique high-tech. Puis, vient Negative Man, de son vrai nom Larry, un ex-astronaute qui, après un malencontreux accident lors d’une mission, a le corps recouvert de bandages et possède désormais des dons radioactifs.
Impossible de ne pas mentionner Rita, une ancienne actrice des 50’s dont l’enveloppe corporelle peut changer de bien des façons – souvent contre son gré, malheureusement. Et, enfin et pas des moindres, il y a Crazy Jane, une jeune femme dont la psyché contient précisément 64 personnalités différentes, avec chacune son propre caractère et, bien sûr, ses propres aptitudes hors normes. Tous vivent en harmonie dans un immense manoir isolé, obéissant aux règles de vie du Chief, leur leader et, pour beaucoup, sauveur, sans qui ils ne seraient plus de ce monde.
Nettement moins connus du grand public que les Superman et autres Batman, les membres de la Doom Patrol (parfois traduit par “La Patrouille du Destin” en VF) ont pourtant un sacré historique derrière eux. Nés en 1963 dans des comics, ils ont été maintes fois rebootés au fil des années, bien avant de débarquer aujourd’hui, en 2019, sur le petit écran. Et en toute franchise, il était vraiment temps que ces super-héros marginaux aient leur heure de gloire, car Doom Patrol est un pari osé.
D’une part, Doom Patrol n’a pas grand-chose à voir avec la série dont elle est dérivée. Durant sa première saison, Titans a misé sur un ton plutôt austère (exception faite de moments plus légers, notamment grâce au personnage de Beast Boy) et un côté très premier degré. Ici, rien à voir.
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Si l’on veut parler figurativement, Titans serait la grande sœur psychorigide là où Doom Patrol aurait plutôt tendance à être la cadette moins sérieuse et grandement plus relâchée. Tout au long de son épisode inaugural, le show n’hésite pas à instiller une dose généreuse d’humour, aussi bien dans sa narration (une voix off bien piquante nous accompagne du début à la fin, un peu comme dans Les Désastreuses Aventures des orphelins Baudelaire) que dans ses personnages.
En revanche, bien qu’elle semble faire de cet aspect décomplexé son porte-étendard, Doom Patrol n’est pas aussi superficielle que ce qu’on pourrait penser. Dans son pilote, qui développe peu d’enjeux et sert essentiellement d’exposition à ces super-héros un peu atypiques, la légèreté ambiante de la série est contrebalancée par des moments plus sensibles, plus profonds.
Les pouvoirs des membres de cette Doom Patrol trouvent leur origine dans des tragédies bien réelles, faisant d’eux des super-héros plus nuancés que la moyenne. Ils n’ont pas une soif particulière de justice ou un besoin intarissable de sauver le monde : ce sont des héros malgré eux, contraints de mettre à profit leurs capacités. Non seulement car ils sont naturellement bons, mais aussi pour donner un sens à leur quotidien autrement morne et éviter de se cloîtrer dans un entre-soi déprimant. En sauvant les autres, ils se sauvent eux-mêmes, et ce constat les rend d’emblée attachants.
Vous l’aurez deviné, Doom Patrol préfère mettre davantage l’accent sur ses personnages plutôt que sur sa trame. Dans les faits, l’intrigue de la saison n’est véritablement lancée qu’à l’issue de la cinquantaine de minutes que dure cet épisode introductif. Pour l’heure, ce n’est pas dérangeant étant donné que les personnages en question ont l’air d’avoir suffisamment d’épaisseur pour que la série ne tombe pas en rade. Au-delà de ça, ils sont jusqu’ici bien incarnés, même Robotman et Negative Man qui demeurent expressifs et touchants grâce aux voix de Brendan Fraser et Matt Bomer en dépit de leur apparence qui limite un tantinet les expressions faciales. On soulignera en prime la prestation de Diane Guerrero, découverte dans Orange Is the New Black, qui se montre assez bluffante.
Esthétiquement, Doom Patrol se situe là aussi aux antipodes de Titans. Tandis que cette dernière semblait plongée dans une obscurité ambiante, son spin-off ne rechigne pas à utiliser davantage de luminosité et de couleurs. Les décors et costumes, en plus de la mise en scène, évoquent par moments le grandiose des films d’aventure des 80’s. Il y a dans l’ensemble une ambiance rétro qui émane de la série, et qui se ressent jusque dans les scènes nécessitant l’usage d’effets spéciaux.
En misant sur Doom Patrol, la plateforme de streaming DC Universe propose une série super-héroïque qui trouve difficilement son pareil sur le petit écran. On pourrait la comparer, peut-être, à The Umbrella Academy, mais l’atmosphère des deux productions est tout de même bien différente. Si Doom Patrol convainc aussi facilement, c’est pour son cocktail justement dosé d’absurde et de tragique, porté par des personnages forts qu’on a envie d’explorer plus en profondeur. On tient un peu là l’ovni des séries de super-héros, et ça semble prometteur pour ce genre assez redondant.
Doom Patrol est diffusée depuis le 15 février 2019 sur DC Universe aux US, et reste inédite en France.