En octobre dernier, Pantone annonçait la sortie d’une teinte de rouge en l’honneur des menstruations, pour célébrer le “courage”, “l’énergie” et “l’empowerment” des femmes. Eh bien, cette nouveauté n’est pas au goût de tout le monde, notamment d’un collectif d’artistes féministes argentines, appelé Cromoactivismo et mené par Marina De Caro, Guillermina Mongan, Victoria Musotto, Daiana Rose et Mariela Scafati. “Comment peut-on penser que [cette couleur] est capable de représenter toute la palette de nos règles ?”, ont-elles critiqué.
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En effet, il n’y a pas de “rouge règles” qui puisse être défini et arrêté, puisqu’il y a autant de couleurs de règles qu’il y a de corps. Selon qu’on se trouve en début ou en fin de cycle, le sang peut prendre une teinte plus ou moins marron et selon les flux ou la contraception utilisée, il peut être clair ou foncé.
“Nous n’accepterons pas qu’une entreprise nous standardise ou vende ce qui nous appartient”
D’après ces artistes militantes, qui ont relayé une tribune sur leur compte Instagram, Pantone essayerait d’imposer une nouvelle norme de “rouge de règles” parfait. “La palette des règles est plurielle, parce que nous sommes nombreuses et différentes. Nous n’accepterons pas qu’une entreprise nous standardise ou vende ce qui nous appartient”, écrivent-elles. Dans leur approche artistique, les membres de ce collectif aiment user de la couleur pour des projets qui critiquent la société de consommation et le capitalisme.
Lors des marches pour les droits à l’avortement en Argentine, la couleur verte est devenue un symbole de cette lutte. Ce collectif avait donc eu l’idée d’intervenir en créant une gamme de verts : “Vert poison contagieux”, “Vert du Sénat”, “Vert légal, protecteur et gratuit”… “On renomme ces couleurs selon nos expériences personnelles et toutes sortes d’expériences politiques que chacune d’entre nous aurait vécues”, ont-elles déclaré.
Quand elles ont vu le rouge de Pantone, elles ont voulu manifester leur opposition. “C’est inacceptable qu’en 2020, il y a encore des femmes qui n’aient pas accès aux produits d’hygiène intime, que les hôpitaux et écoles n’aient pas suffisamment de stock. […] La santé de notre corps est un droit. Non à la régulation de nos couleurs ! Nos corps sont libérés, Laurie Pressman”, ont-elles adressé à la vice-présidente du Pantone Color Institute qui a bâti sa campagne sur l’empowerment.
Ce n’est pas la première fois que les artistes argentines s’opposent à Pantone. Elles reprochent à l’entreprise de s’approprier une culture pour la faire entrer dans des cases, de faire des couleurs leur propriété privée et leur marchandise, de capitaliser sur les menstruations pour se faire de l’argent. Ce rouge avait d’ailleurs été créé en collaboration avec une marque d’hygiène intime féminine, Intimina. Suite à cette campagne purement commerciale, les deux entreprises n’ont même pas annoncé œuvrer pour l’accès aux protections hygiéniques.