Du plomb…
Quatre actrices qu’on fout en bikini. Autour d’elles, mettons un James Franco métamorphosé (qui court après l’Oscar du meilleur second rôle, rendez-vous dans un an) qui ponctue ses phrases par “y’all” et dont les mimiques faciales laissent entrevoir une dentition à base de… plomb, justement.
Rajoutons aussi un Gucci Mane en frenemy (à la fois “friend” et “ennemy”) dudit Franco. Emmenons tout ce beau monde en Floride pendant le spring break, avec de l’alcool, de la drogue, et des flingues. Cette flopée de critères, de personnages et d’éléments scénaristiques, c’est le contenu promotionnel du film. Ce qui attire le public. C’est assumé.
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Bande-annonce de Spring Breakers
… à l’or
L’or, c’est le résultat, ce matériau qu’on a envie de chérir : Spring Breakers. Autrement dit, une mise en scène hallucinante. Finalement, Spring Breakers ne parle pas de coke sniffée sur des seins à peine pubères, ou si peu. Spring Breakers parle d’un échappatoire à une vie triste. Ces quatre filles un peu trop pauvres veulent s’évader de leur morne vie et vont jouer aux gangsters pendant une heure de fantasme, de rêve, de trip visuel.
Finalement, Korine signe un film qui est le juste milieu entre Enter The Void, Trainspotting et Projet X (autrement dit, trois films que je n’ai pas aimés). Et pourtant, c’est un bon film.
Le réalisateur de Mister Lonely ne veut pas choquer, pas plus qu’il ne se retient de le faire (c’est ici la différence avec Gaspar Noé). Il filme juste selon ses envies, inconsciemment, naturellement. Tout n’est que légèreté. Et créer de la légèreté avec des images aussi lourdes, surchargées, saturées, ce n’était pas gagné.
Une bande-originale comme reflet du film
Quelque chose de lourd utilisé à bon escient, c’est la musique. Même quand Skrillex vient fourrer ses sales pattes, l’ensemble reste cohérent, efficace, et surtout extrêmement soigné : Korine aime assez la musique pour laisser les morceaux jusqu’au bout. Ainsi, cette bande-originale ne fait pas du film un long clip, mais elle est au contraire son reflet auditif, et c’est tout aussi jouissif.
D’autre part, certaines scènes sont incroyablement construites. Je pense évidemment à la scène où James Franco se met à chanter du Britney Spears au piano, mais ce n’est pas la seule. Korine s’amuse à faire des va-et-vient tout au long des scènes, les déconstruit, répète certains dialogues jusqu’à l’écœurement.
Il crée le flash-back (ou forward ? on ne sait même pas) dans le présent : les scènes sont montées comme un puzzle : l’ensemble est homogène dans l’espace et le temps, mais les morceaux sont éparpillés, répétés, remontés, démontés.
Il montre la vacuité d’un scénario auquel il n’y a finalement pas grand chose à changer par une mise en scène débordante d’idées et de propositions. Harmony Korine, alchimiste et réalisateur, cinéaste du désir, je vous tire mon chapeau.
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Article préalablement publié sur Across The Days.