Tilikum, connue sous le surnom de “l’orque tueuse” s’est éteinte dans son bassin du parc Sea World à Orlando (Floride) à l’âge de 36 ans. Sa triste histoire qui a inspiré le documentaire culte Blackfish aura contribué à changer les mentalités sur la captivité des animaux marins.
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L’orque Tilikum est morte vendredi 6 janvier à l’âge probable de 36 ans des suites d’une infection pulmonaire d’origine bactérienne au terme de trente-trois ans de captivité, dont vingt-cinq au parc SeaWorld d’Orlando. Cette orque mâle de près de 7 mètres et de plus de 5 tonnes à l’âge adulte avait été arrachée à sa famille au large des côtes islandaises en 1983. Tilikum était devenu tristement célèbre pour avoir tué trois personnes par noyades et fractures, dont sa dresseuse Dawn Brancheau en 2010, en pleine représentation et devant un parterre d’enfants.
Son histoire avait inspiré le documentaire Blackfish (L’orque tueuse) réalisé par la chaîne CNN en 2013. Celui-ci dénonçait la captivité des orques et plus généralement l’envers du décor du business lucratif des parcs de loisirs marins au détriment de la souffrance psychologique des animaux. Aujourd’hui, les mentalités ont commencé à changer et les attractions faisant intervenir des animaux sauvages comme les cirques, les zoos et les parcs marins n’ont plus la cote. Voilà pourquoi il est important que notre génération soit la dernière à avoir engraissé ces industries contre-nature.
Pourquoi vouloir domestiquer la nature à tout prix ?
Quand j’étais petite, j’allais en vacances avec mes parents sur la Côte d’Azur. Et chaque été, je les traînais au parc Marineland d’Antibes, qui propose lui aussi des spectacles avec les orques : c’était, comme des millions d’enfants à travers le monde, mon attraction préférée. Comment ne pas s’émerveiller devant des baleines de 5 mètres faisant des sauts immenses, des coucou avec leur nageoires et des bisous aux dresseurs qui nagent avec eux ! Le rêve…
Comment en tant que parent (pourtant blasé de se faire entraîner dans ce traquenard déprimant, grouillant de monde et pompe à fric) refuser à ses enfants de s’émerveiller devant des animaux majestueux qu’ils ne verront peut-être jamais en vrai ?À l’époque (c’est-à-dire au milieu des années 1990 me concernant), ces spectacles étaient un peu “révolutionnaires”, on n’était pas sensibilisés à la souffrance animale et on ne se posait pas trop de questions.
Il suffit de regarder les spectacles d’orques sur YouTube pour en comprendre la magie vicieuse. Tout tourne autour de la domestication incroyable de géants des mers par l’homme. Comment un jour, par exemple, quelqu’un a-t-il réussit à mettre au point une technique pour faire danser une baleine dans l’eau et lui faire prendre un homme sur son dos ? Il y a une fascination que l’on ne peut pas nier lorsque l’on assiste à de tels prouesses. Et à vue d’œil, les animaux n’ont pas l’air malheureux (puisqu’ils font des bisous !).
Au-delà des conditions de captivité monstrueuses des orques (mais l’on pourrait élargir à tous les animaux en cage) et que dénoncent les associations, c’est cette déformation que nous avons à nous attendrir devant la nature quand elle nous ressemble qui me pose problème. L’orque qui dit bonjour avec sa nageoire, l’éléphant qui donne la patte, le tigre qui marche sur deux pattes, le singe qui porte des fringues, le perroquet qui parle… D’où nous vient cette tendance égotiste à admirer les bêtes, en particulier lorsqu’elles sont humanisées ? Et à les craindre lorsqu’elles nous défient (personne ne fait dire “coucou” à un requin ni à un crocodile) ?
J’aimerais faire partie de la génération qui résistera et n’emmènera pas ses enfants dans de tels lieux (qui bizarrement existent encore), leur faisant naïvement croire que la nature est domptable et surtout qu’il est naturel de la dompter. J’aimerais que mes enfants n’attendent pas d’être adultes pour comprendre que la nature s’observe mais ne se domestique pas. Ainsi, peut-être, naîtra une nouvelle génération plus en phase avec la planète qu’elle habite.
Ce jour-là, je ressortirai les dizaines de clichés argentiques que j’ai pu prendre frénétiquement à Marineland avec mes appareils photo jetables Kodak, en me disant qu’ils sont désormais l’archive d’une époque révolue.