Si vous possédez une PlayStation 4, vous avez peut-être joué à Tetris Effect, l’un des hits inattendus de 2018, basé sur un classique universel, le summum du gaming pour tous. Ce jeu est plus qu’une version de Tetris en réalité virtuelle. Là aussi il faut empiler des tétrominos et faire des lignes comme s’il n’y avait pas de lendemain, mais Tetris Effect est un jeu à concept : il met sur un pied d’égalité gameplay et sensations.
À voir aussi sur Konbini
Le titre nous fait avancer de tableau en tableau, avec autant d’esthétiques que d’expériences différentes. Un petit voyage New Age qui repose autant qu’il excite. Associés à l’aspect répétitif du concept de base, les musiques et les graphismes nous font vivre une véritable expérience sensorielle.
Tetris Effect a un mode “zone”, une mécanique de jeu qui ralentit le temps, ce qui rend l’action plus claire et plus facile, et nous permet d’être le plus efficace possible dans un laps de temps réduit.
Cette idée de “zone”, renvoie au phénomène du “flow”, qui a fait l’objet d’une étude récente – celle-ci conclut notamment que, sous certaines conditions, Tetris peut aider à lutter contre l’anxiété. Le “flow”, la “zone”, ou encore l’état dit de “pleine conscience” désignent une forme de concentration extrême, une sorte de transe que l’on peut atteindre lorsque l’on travaille ou que l’on joue (surtout si la tâche effectuée est répétitive). D’aucuns déclarent que le flow est atteignable dans tout jeu vidéo réussi — et on n’est pas loin de le penser également.
Voici une poignée d’exemples qui vont vous aider à atteindre cet état de “jeu automatique” (pensez tout de même à respirer).
Dans cette petite liste, on observe quelques constantes. La plupart de ces titres rentrent dans la catégorie des “jeux indépendants”. S’ils ne sont pas faits par une petite boîte, ce sont des projets portés par des individus. En effet, la créativité n’est pas vraiment la priorité des blockbusters du jeu vidéo – par ailleurs, on voit mal un grand éditeur se lancer dans une campagne de marketing en disant “Vous allez souffrir, et c’est le but” (bon, sauf quand il s’agit d’un Dark Souls).
Ces titres accordent aussi une grande importance à la musique dans le gameplay : ils sont donc, pour la plupart, des jeux de rythme (dont les précurseurs ne sont autres que Rez ou Child of Eden).
Hotline Miami, l’hallucination ultraviolente
Cet exemple n’est pas d’une prime fraîcheur, puisque les deux volets de Hotline Miami datent respectivement de 2012 et 2015. Mais c’est LA franchise qui a lancé la mode de la “zone” dans les jeux indépendants des années 2010 – un “genre” encore en gestation.
Le concept de Hotline Miami est de mélanger shoot et flow. Tous les ingrédients sont là : musique techno et hypnotique, très grosse difficulté et rythme hallucinant. Vous êtes morts ? Vous revoilà en selle une milliseconde plus tard.
Quand tout va bien, vous assassinez des dizaines de méchants en trouvant la chorégraphie parfaite, comme si vous étiez en plein délire sous coke. Et une fois la salle vidée, tout s’arrête, le silence revient, et vous voilà en train de marcher sur une montagne de cadavres. Hotline Miami semble vous dire “Mais pourquoi tu as fait tout ça ?” – et ce n’est pas le scénario qui s’embarrassera d’une réponse.
En plus d’être d’excellents défouloirs mettant vos réflexes à rude épreuve, les deux jeux sont en pixel art, ce qui fait qu’ils vieillissent bien. Bon, ce n’est peut-être pas la meilleure activité à faire avant un rencard ou un entretien important – on voit encore un peu de bave au coin de vos lèvres, là.
Catherine, la folie des cubes
Bonne nouvelle, Catherine Classic vient de sortir sur PC. Mais il serait sans doute un peu plus sage d’attendre la sortie de Catherine : Full Body sur PS4 (si vous en avez une). Bref, c’est l’occasion de (re)découvrir ce jeu japonais sorti en 2012 en France.
Résumé de ce nébuleux jeu d’Atlus : Vincent, trentenaire, doit faire face à des difficultés relationnelles dans la vraie vie, et pousser des cubes dans des rêves où il est pourchassé par des fesses monstrueuses (si, si). Le gameplay de Catherine rappelle celui de Q*bert : vous devez gravir une montagne de cubes sans tomber et échapper à la destruction progressive de la structure.
Chaque niveau présente une nouvelle contrainte : des cubes glissants, des mortels, des lourds, des friables et tutti quanti. Ce jeu particulièrement difficile vous demande de raisonner vite et bien, afin de rattraper les pires situations – bref, de devenir un pro du rangement express (Marie Kondo serait fière de vous). Un bon jeu à concept, bien que pas très substantiel (hormis quelques phases de dialogue pour se reposer et une kilotonne de cinématiques).
Point bonus : le mode “deux joueurs” est encore plus difficile.
Crypt of the NecroDancer, le pas de côté
Sorti début 2015, Crypt of the NecroDancer ne vieillira jamais vraiment. Son principe est très simple sur le papier : il s’agit d’un rogue-like où chaque beat de musique est un mouvement. Vous évoluez donc sur un quadrillage et devez effectuer une chorégraphie parfaite, afin de vous aventurer dans les profondeurs d’un donjon et éliminer des monstres.
Cinq niveaux thématiques, avec trois sous-parties à chaque fois, et un rythme effréné que vous avez tout intérêt à respecter, car les bonus que vous obtiendrez ainsi rendent le jeu bien plus facile. Tout l’intérêt de la chose consiste à comprendre comment évoluent les ennemis et comment les contrer, mais aussi de découvrir les mille secrets que ce jeu met à votre disposition pour vous faciliter la tâche.
Ce jeu étant un rogue-like, il faudra tout refaire si vous vous plantez – mais vous débloquez des armes et de nouvelles façons de jouer en cours de route. La bonne zik est, heureusement, de la partie : c’est Danny Baranowsky qui s’en est occupé. Il a même fait deux remix intégraux de la bande-son pour les modes supplémentaires. Crypt of the NecroDancer est aussi fascinant pour le joueur que pour les (éventuels) spectateurs.
Les amateurs de difficulté peuvent lentement progresser vers un mode ultime absurde, où le moindre écart vous obligera à tout recommencer.
Thumper, la violence du rythme
Quand un jeu atteint l’harmonie entre son gameplay et sa narration, c’est quasi exclusivement au profit de sensations entières, sereines, chaudes. C’est sans doute pour cela que les développeurs de Thumper se sont dit : “On va faire de votre vie un enfer, et vous allez aimer ça.” Ici, vous êtes un insecte qui doit avancer à toute vitesse sur une piste infinie. Quelque part dans les limbes ? Sur l’autoroute de l’information ? On ne sait pas, mais il faut éviter de plus en plus d’obstacles.
Plein de choses différencient Thumper d’un runner lambda qu’on pourrait trouver sur portable. Ce jeu vous fait fusionner avec la manette et verse dans l’ultraviolence sensorielle : la bande-son de Brian Gibson est uniquement composée d’instrus oppressantes. Vous accompagnerez chaque élément sonore en esquivant les obstacles et en négociant les virages. C’est sombre et ultra-rapide, et ça le devient de plus en plus. Il faut être un habitué du genre pour finir ce jeu fascinant à observer.
Juste mais très difficile, Thumper est exigeant, voire farceur sur la toute fin. Le flow, lui, vient très vite, et vous serez surpris de voir à quelle vitesse on passe en mode automatique. Thumper est l’un des meilleurs jeux à ambiance de ces dernières années. Et s’il s’adresse plutôt aux masochistes, il reste une expérience intéressante.
Si vous avez la chance d’avoir un casque de réalité virtuelle, vous pouvez prolonger l’expérience en la rapprochant un peu plus de vos yeux (par contre, le jeu sera encore moins pour les épileptiques).